Côte d’Ivoire: des militaires dispersent une manifestation en tirant en l’air à Bouaké
Bouaké (Côte d’Ivoire) - Les
manifestants, qui protestent contre l’action de militaires mutins à Bouaké,
deuxième ville de Côte d’Ivoire (centre) ont fait refluer les soldats dans leur
caserne après avoir été dispersés dans la matinée, a constaté un journaliste de
l’AFP.
Ces événements surviennent avant
l’arrivée prévue ce vendredi du ministre de la Défense, Alain-Richard Donwahi,
attendu pour conclure les négociations avec les mutins après l’accord de samedi
dernier.
Environ 200 manifestants s’étaient
rassemblés sur le rond-point de la préfecture de Bouaké pour demander aux
militaires de "mettre un terme à (leur) révolte", à l’appel de cadres
du Rassemblement des républicains (RDR, le parti du président Alassane Ouattara).
"Nous sommes fatigués de leurs
agissements. Nous allons prendre nos responsabilités et descendre dans la
rue", avait annoncé jeudi Yacouba Traoré, un notable, et l’un des
initiateurs de cette manifestation.
Au bout de quelques minutes
vendredi, des camions militaires sont arrivés, des soldats ont tiré en l’air et
ont très rapidement dispersé la foule.
Toutefois, quelques minutes plus
tard, les manifestants dont le nombre a gonflé, approchant les 300 ou 400, sont
revenus, faisant refluer les militaires dans leurs casernes.
"Libérez Bouaké!",
"On a faim, on veut travailler!", scandaient notamment les
manifestants.
Dans la nuit de mercredi puis jeudi
matin, les militaires avaient tiré en l’air à Bouaké pour "mettre la
pression" sur le gouvernement. "Nous attendons notre argent demain
(vendredi). Ce qui compte c’est l’argent", avait déclaré l’un des mutins à
l’AFP.
Le weekend dernier, le mouvement
des mutins avait fait tache d’huile, s’étendant à la plupart des casernes du
pays, notamment dans la capitale économique Abidjan.
Les revendications des mutins, dont
beaucoup sont d’anciens rebelles, sont matérielles. Elles marquent le retour
d’un problème récurrent dans un pays sorti en 2011 de dix ans de rébellion dont
Bouaké, 1,5 million d’habitants, fut la capitale.
Un accord avait été trouvé samedi à
Bouaké entre le ministre et des soldats qui réclament le paiement de primes,
des augmentations de solde, une promotion plus rapide entre les grades ainsi
que des logements.
Samedi, des militaires en colère avaient
cependant empêché le ministre et sa délégation de quitter la résidence du
sous-préfet pendant plus de deux heures.
En novembre 2014, déjà, une vague
de protestation de soldats était partie de Bouaké et s’était également étendue
à Abidjan et d’autres villes.
La rébellion du nord qui coupa la
Côte d’Ivoire en deux de 2002 à 2011 était favorable à M. Ouattara. Le sud
était tenu par les forces loyales à l’ex-président Laurent Gbagbo.
La Côte d’Ivoire a mis en route en
2016 une ambitieuse loi de programmation militaire jusqu’en 2020. Elle prévoit
modernisation et achats d’équipements pour 1,2 milliard d’euros et une refonte
des effectifs. L’armée ivoirienne - 22.000 hommes au total - compte trop de
gradés comparativement aux nombres de soldats.
Le pays a achevé mercredi une
réorganisation politique. Le président a nommé mardi l’ancien Premier ministre
Daniel Kablan Duncan vice-président, poste nouveau créé après le référendum
constitutionnel de novembre, et Amadou Gon Coulibaly, ex-secrétaire général de
la présidence, nouveau Premier ministre. Ce dernier a formé mercredi un nouveau
gouvernement plus restreint que la précédente équipe.
str-pgf/jpc