Discours du vice-Président de la République à la 3ème édition du Forum Investir en Afrique (FIA) à Dakar
Le vice-Président de la
République, S.E.M. Daniel Kablan DUNCAN, a quitté Abidjan le dimanche 24
septembre 2017, à destination du Sénégal, où a il représenté le Chef de l’Etat,
S.E.M. Alassane OUATTARA, à l’ouverture officielle de la 3ème édition du Forum
« Investir en Afrique » (FIA) prévue du 25 au 27 septembre 2017 à Dakar.
Discours
Excellence
Monsieur Macky SALL, Président de la République du Sénégal ;
Excellence
Monsieur Faure Gnassingbé, Président de la République du Togo ;
Monsieur
le Vice-ministre des Finances, représentant le Gouvernement de la République
populaire de Chine ;
Mesdames
et Messieurs les Ministres ;
Monsieur
le Directeur général et Chef de l’Administration du Groupe de la Banque
Mondiale ;
Excellences,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Membres du corps diplomatique ;
Monsieur
le Vice-président exécutif de la Banque chinoise de développement ;
Mesdames
et Messieurs les Représentants des Institutions Bilatérales, Régionales et
Multilatérales de développement ;
Mesdames
et Messieurs les Présidents de Conseil d’Administration, Directeurs Généraux et
Chefs d’Entreprises ;
Distingués
participants ;
Chers
amis des Médias ;
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Excellence
Monsieur Président de la République du Sénégal,
Votre
frère, S.E.M Alassane OUATTARA, Président de la République de Côte d’Ivoire,
Président en exercice de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine
(UEMOA) aurait bien voulu prendre part, personnellement, à cet important Forum,
n’eut été une contrainte très forte de dernière heure.
C’est
donc, pour moi, un insigne honneur de le représenter à cette importante
rencontre, et de vous renouveler ses très vifs remerciements pour l’aimable
invitation que vous avez bien voulu lui adresser. C’est aussi un immense
privilège pour moi de prendre la parole, en son nom, devant cette auguste
assemblée.
Je
voudrais également vous adresser ses vives félicitations pour avoir permis à
votre pays d’abriter la 3ème édition du Forum Investir en Afrique, et nous
réjouir de sa parfaite organisation. Cela illustre la grandeur de vos ambitions
pour votre pays, en témoigne la réalisation de la nouvelle ville de Diamniadio,
pôle urbain moderne innovant.
Je
voudrais saluer la présence très distinguée, à vos côtés, de S.E.M Faure
Gnassingbé, Président de la République du Togo, Président en exercice de la
CEDEAO, qui témoigne la solidarité et le soutien de la sous-région
ouest-africaine, à l’organisation de ce Forum dans la capitale sénégalaise.
J’adresse
mes vifs remerciements aux Hauts représentants de la République populaire de
Chine, de la Banque chinoise de développement et du Groupe de la Banque
Mondiale pour leur présence effective à ce Forum, ainsi que pour le précieux
accompagnement de leurs institutions au développement de l’Afrique.
Excellences,
Mesdames et Messieurs
Je
voudrais particulièrement me féliciter de la création en 2015 du « Forum
Investir en Afrique (FIA) », en tant qu’instrument de renforcement de la
coopération entre l’Afrique et la Chine, mais aussi en tant qu’outil de
promotion des opportunités d’investissements en Afrique. Je remercie donc les
autres co-organisateurs de ce forum, notamment le Ministère des Finances de la
République Populaire de Chine, représenté par le vice-Ministre des Finances,
Monsieur Yaobin Shi, la Banque chinoise de développement représentée par le Vice-Président
Exécutif, Monsieur Yongsheng Wang et le Groupe de la Banque Mondiale représenté
par Monsieur Shaolin Yang, Directeur général et Chef de l’Administration.
En
mettant ensemble des Etats, ainsi que des institutions multilatérales et
bilatérales, cette initiative traduit bien la volonté de développer des
synergies de plus en plus fortes entre ces entités pour construire un avenir
meilleur pour les populations africaines.
En
cela, le thème de cette troisième édition de la FIA, à savoir « Accélérer le
développement de l’Afrique par l’innovation » trouve toute sa pertinence, en
particulier dans la perspective du renforcement de la coopération entre notre
continent et la Chine.
En
effet, les échanges commerciaux entre la Chine et l’Afrique se sont accélérées
au cours des dix dernières années pour atteindre 300 milliards de dollars US en
2015.
En
ce qui concerne les investissements directs étrangers (IDE), ils progressent
encore plus vite, à un rythme annuel de l’ordre de 40 %. Le stock d’IDE chinois
sur le continent est estimé à 35 milliards de dollars US, quand les projets
d'investissements chinois en Afrique ont dépassé 2,5 milliards de dollars US,
en 2016.
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Avec
un taux de croissance économique moyen de près de 5 %, au cours de la décennie
2004-2014, taux supérieur à la moyenne mondiale de 2,8 %, l’Afrique est
désormais visible sur les cartes économiques. La stabilité politique, ainsi que
les réformes structurelles et sectorielles d’envergure mises en œuvre au niveau
macroéconomique, les ressources naturelles importantes révélées ou exploitées
et les potentialités du capital humain font de l’Afrique un continent
d’opportunités et d’avenir. En d’autres termes, l’Afrique apparait chaque jour
davantage comme la « Nouvelle frontière du développement », voire l’avenir de
l’humanité.
Notre
continent dispose de nombreux atouts pour son développement. En effet, son
sous-sol est extrêmement riche avec environ 30 % des réserves mondiales en
minerais. En plus, l’Afrique dispose de 60 % des terres arables inexploitées,
au monde, ainsi que de ressources humaines qui ne demandent qu’à être mise en
valeur.
En
effet, dans un contexte mondial marqué par le vieillissement de la population
des pays développés, la population africaine, avec 1,2 milliard d’habitants en
2016, et projetée à 2,5 milliards en 2050. Elle est surtout très jeune, avec
40% de la population qui a moins de 15 ans. Cette population constitue, certes
une forte charge au départ, mais elle est aussi un véritable creuset
d’intelligence et de main d’œuvre potentielle pour le futur du continent et
même du monde, si elle est bien formée, en bonne santé et dotée du savoir-faire
nécessaire, atout indéniable pour le dividende démographique.
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Malgré
cette croissance soutenue et ses potentialités, la part du continent dans le
commerce mondial reste encore marginale, autour de 3 %. Le profil des exportations
africaines est caractérisé par la dépendance à l’égard des produits de base à
faible valeur ajoutée. Ainsi, la part de l’Afrique dans la valeur ajoutée
manufacturière mondiale est extrêmement faible, rendant nos économies fortement
dépendant des variations des cours des produits de base agricoles et miniers.
La productivité et la compétitivité dans certains secteurs, notamment
l’agriculture et l’industrie restent encore faible en raison d’une insuffisance
d’investissement dans les infrastructures technologiques et dans l’innovation.
L’expérience des pays qui ont réussi leur transition telle que la Chine,
l’Inde, la Corée du Sud, le Brésil, nous montre le chemin à suivre et rôle et
l’impact de l’innovation dans la transformation structurelle de l’économie.
De
ce fait, il nous faut relever des défis encore nombreux, complexes et urgents.
Il s’agit de (i) l’éducation/formation pour disposer d’un capital humain bien
formé, (ii) de la transformation structurelle des économies africaines, (iii)
du développement des infrastructures, (iv) de la lutte contre l’insécurité et
le terrorisme, (v) de la lutte contre le réchauffement climatique et (vi) du
défi du financement adéquat de notre développement.
Et
pour relever ces défis, rattraper le retard de l’Afrique et accélérer son
développement, l’introduction de l’innovation technologique dans ces différents
secteurs apparait comme une voie incontournable.
Cet
impératif avait été compris et anticipé depuis les années 1960, par le Premier
Président de la Côte d’Ivoire, Feu Félix Houphouët-Boigny, grand homme d’Etat,
doté d’un leadership visionnaire, qui avait proclamé que « L’avenir appartient à la science et à la
technique ». Il en avait fait une priorité de son action de développement,
matérialisée par la création de nombreux instituts de recherche et
l’introduction de l’éducation par la télévision à l’école primaire. Dans son
ambition pour la l’avènement d’une Côte d’Ivoire moderne, il a ajouté que « si
la Côte d’Ivoire a raté la révolution industrielle, elle ne doit pas rater la
révolution informatique ».
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Le
recours plus accru au Savoir et à l’innovation aidera l’Afrique à mettre en
œuvre les nombreuses initiatives de développement actuelles et futures. A cet
effet, il faut développer les compétences, les technologies et les capacités
d’innovation dont le continent a tant besoin pour concrétiser le programme de
transformation de l’Afrique.
Le
potentiel d’innovation est très élevé sur notre continent. L’exigence d’une
croissance économique forte, durable et inclusive, ainsi que les efforts
actuellement entrepris sur le continent plaident en faveur de plus
d'investissements dans ce secteur. Cependant, un obstacle majeur subsiste,
celui des capacités de financement.
Je
voudrais à cet effet, souhaiter que nos pays montrent un engagement plus ferme
à financer la recherche, la science et l’innovation technologique à travers
l’allocation de ressources budgétaires plus conséquentes. Chaque pays pourrait
progressivement affecter 1% de son budget à l’innovation, avec l’ambition
d’atteindre 1% du PIB à plus long terme. La mise en place de partenariats
publics-privés peut contribuer à lever, en partie, cette contrainte et
accélérer le développement de l’innovation industrielle et technologique.
Il
me semble également impérieux d’envisager :
• d’inscrire la promotion du Savoir et
de l’innovation au cœur des politiques publiques pour le développement ;
• de favoriser le dialogue en faveur de
l’échange d’idées et une réflexion innovante parmi les chercheurs, les
praticiens du développement et les décideurs africains ;
• et de donner l’opportunité, aux jeunes
chercheurs africains, aux Africains de la diaspora, ainsi qu’aux organisations
régionales et sous régionales, de diffuser les résultats de leurs recherches,
tout en garantissant la protection des droits de propriété intellectuelle.
Aujourd’hui,
il est quasiment acquis que le développement de l’Afrique ne peut pas être
dissocié de celui des nouvelles technologies et de l’innovation en général.
En
effet, l’accès au numérique favorise la croissance du Produit intérieur brut
(PIB), et cette tendance est déjà observée en Afrique. Le marché potentiel est
énorme et se confirme au fur et à mesure que les citoyens sortent de la
pauvreté grâce à cet outil, notamment au Kenya, en Afrique du Sud, au Sénégal,
au Nigeria, au Rwanda ou en Côte d’Ivoire.
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
En
ce qui concerne la Côte d’Ivoire, le Gouvernement, sous la haute égide de SEM
Alassane OUATTARA, Président de la République, a mis en œuvre d’importantes
actions en vue de développer l’esprit de créativité des Ivoiriens et
l’innovation technologique
Dans
le secteur de la formation, d’importantes ressources ont été investies afin de
permettre à l’Institut National Polytechnique Félix Houphouët-Boigny (INP-HB)
de Yamoussoukro, Centre d’Excellence de la Banque Mondiale, ainsi qu’à l’Ecole
Supérieure Africaine des Technologies de l’Information et de la Communication
(ESATIC) d’assurer la formation de l’élite en matière d’ingénierie et de
nouvelles technologies. En parallèle, nous avons introduit, l’enseignement des
TIC dès l’école primaire.
L’objectif
visé par la Côte d’Ivoire est de faire passer la part des TIC dans l’économie
ivoirienne de 7 à 8 % actuellement à environ 15 % à l’horizon 2030.
A
cet effet, les actions mises en œuvre portent entre autres sur :
- la mise en place progressive d’un
Réseau National Haut Débit à base de fibre optique de 7000 km d’ici fin 2018,
dont 2000 km sont déjà réalisés;
- l’opération « un citoyen, un
ordinateur, une connexion internet » initiée par l’Agence Nationale du Service
Universel des Télécommunications (ANSUT) ;
- la création du Fonds d’Appui à la
Recherche et à l’innovation doté d’un montant annuel de 500 millions de FCFA ;
- la création du Fonds Compétitif pour
l’Innovation Agricole Durable (FCIAD) ;
- la création de l’Université virtuelle
qui permet déjà la formation en ligne de près de 5000 étudiants ;
- la création d’une zone franche de
biotechnologie et des technologies de l’information et de la communication,
notre future silicon Valley, sur un espace de 644 ha dont 180 ha déjà aménagés
;
- le soutien régulier de l’Etat aux
inventeurs et innovateurs à travers la prise en charge de 80 % des côuts de
protection des inventions et innovations.
L’une
des dernières initiatives du gouvernement ivoirien pour impulser une nouvelle
dynamique au secteur de l’innovation concerne la miss en place en juillet 2016,
avec l’appui de la Banque Africaine de Développement, du « Fonds Ivoirien de
l’Innovation ». Ce fonds, dont « la taille indicative » est estimée à 131
milliards de francs CFA, a pour mission de renforcer les infrastructures
dédiées à l’innovation et de soutenir les entreprises, en particulier les
startups, dans leur évolution. Il permettra « d’investir durablement dans la
croissance des entreprises technologiquement innovantes en Côte d’Ivoire », et
dans la zone de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), grâce
à des plateformes physiques et virtuelles.
A
ces actions, s’ajoutent les réformes structurelles et sectorielles mises en
œuvre pour améliorer l’environnement des affaires, à travers principalement la
dématérialisation des actes administratifs, notamment en matière de procédures
fiscales et de création d’entreprises. L’objectif visé est de faire et de
maintenir le secteur privé comme le principal moteur de l’économie ivoirienne.
Il est a souligné que plus de 63 % des investissements sont réalisés par le
secteur privé sur la période 2012-2016. Cela a permis de réaliser une forte
croissance économique au taux moyen annuel de 9 % sur cette la période.
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Aujourd’hui,
les efforts déployés dans plusieurs pays africains en faveur de l’innovation
portent déjà des fruits dans plusieurs domaines, notamment l’agriculture, la
santé, les transports, l’énergie et le commerce.
Dans
de nombreux pays africains, l’on assiste au développement fulgurant de la
téléphonie mobile et notamment du mobile-money. En Côte d’Ivoire, sur près de
31 millions d’abonnés à la téléphonie mobile, soit 126 % de la population, 8 millions sont détenteurs de comptes mobile
money. Ils effectuent en moyenne 17 milliards de FCFA de transactions
financières par jour, améliorant ainsi l’inclusion financière. Le secteur de
l’économie numérique en Côte d’Ivoire emploie plus de 120 mille personnes,
quand le seul secteur de la téléphonie mobile génère un chiffre d’affaires
annuel de plus de 1000 milliards de FCFA.
Dans
le domaine de l’énergie, je ne peux manquer d’évoquer l’apparition des kits
solaires photovoltaïques et de l’énergie produite à partir de la biomasse,
solutions innovantes au problème d’électrification des zones rurales les plus
éloignées.
Bien
d’autres innovations sont également à signaler sur le continent, en particulier
en ce qui concerne la création de logiciels ou d’applications. Ce sont entre
autres :
- la tablette éducative Qelasy, le
carnet de vaccination numérique et le cartable solaire conçus en Côte d’Ivoire
;
- la recharge solaire ou « Mobile Kiosk
Platform » mise en œuvre au Rwanda ;
- Mlouma, la bourse agricole en ligne
au Sénégal ;
- MPedigree, l’application mobile
contre les faux médicaments au Ghana ;
- le mobile money avec M-Pesa et «
Twende Twende », l’application anti-embouteillages au Kenya ;
- La tablette Cardiopad au Cameroun.
Excellence
Monsieur le Président de la République ;
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
L’innovation
est le raccourci le plus efficace pour atteindre rapidement les objectifs de
développement de l’Afrique, au regard des contraintes spécifiques auxquelles le
continent est confronté. En effet, comme l’a rappelé le Président de la
République, S.E.M Alassane OUATTARA, à l’occasion de la 5ème édition du Forum
des Marchés Émergents tenue à Abidjan, le 26 mars 2017, « c’est par
l’intégration de la science et de la technologie dans les modèles de production
et d’organisation que l’Afrique saura faire face aux défis futurs, notamment
ceux liés au réchauffement climatique, à la disponibilité d’énergie
renouvelable abondante, à l’autosuffisance alimentaire, à la santé pour tous, à
l’industrialisation et à l’emploi ».
Notre
vœu est donc qu’à l’issue de cet important Forum, naisse un grand mouvement
pour soutenir et promouvoir l’innovation partout en Afrique, et en particulier
auprès de la talentueuse et entreprenante jeunesse africaine.
Je
vous remercie de votre aimable attention.